La Manufacture se renouvelle

Fil d'Ariane

Implantée à la Krutenau depuis 1849, la Manufacture des tabacs entame une nouvelle vie. Le bâtiment emblématique de l'architecture industrielle du XIXe siècle, anciennement dédié à la fabrication de cigares, abrite peu à peu un écosystème centré sur la jeunesse, les arts, les sciences et l’innovation. 

Le classement de la Manufacture des tabacs de Strasbourg comme monument historique, en 2016, est venu mettre en lumière l’histoire riche et mouvementée de ce bâtiment. En 175 ans d’existence, la Manufacture a vécu les débuts de l’industrialisation, l’Annexion, les bombardements, les changements de propriétaires, l’arrêt de l’activité et, finalement, une complète requalification. 


Acquis par la Société d’aménagement et d’équipement du Rhin supérieur (Sers) en 2015, cinq ans après la cessation des activités industrielles, l’espace de 21 500 m², situé en plein cœur du quartier de la Krutenau à Strasbourg, est en pleine mutation. 

Préservation du patrimoine

Dès l’arrêt de la production de cigares en 2010, la Ville a commencé à réfléchir à la manière de préserver ce patrimoine exceptionnel. « Nous avons mené une réflexion à la fois sur la conservation du patrimoine et sur un contenu programmatique qui pouvait répondre à ces critères de préservation », détaille Damien Mehl, chef de projets urbains pour la collectivité. Dans le même temps, l’Université cherche de nouveaux locaux dans le cadre du plan Campus et un cahier des attentes est ouvert par l’Association des habitants Bourse Austerlitz Krutenau (Ahbak) pour recueillir les suggestions des citoyennes et citoyens sur l’avenir de la Manufacture. « Assez rapidement, les grandes thématiques du projet se dessinent : la formation, le développement économique et l’animation urbaine au sens large », poursuit Damien Mehl.

La municipalité se tourne alors vers la Sers. « Nous savions que beaucoup de promoteurs tournaient autour, mais c’est la Ville qui avait la clé : c’est la collectivité qui définit le Plan local d’urbanisme et le zonage de la Manufacture ne permettait pas d’y faire des logements », se souvient Eric Hartweg, directeur de la Sers qui acquiert officiellement les bâtiments auprès d’Imperial Tobacco le 3 septembre 2015, avec comme contrat moral de respecter le programme tel qu’il a été imaginé par la Ville. Trois instances sont créées pour dessiner l’avenir des lieux : un comité patrimoine, un comité maître d’ouvrage et un comité usagers, regroupant les futurs occupants et des associations de quartier ; et un cahier de prescriptions est établi par l’architecte du patrimoine Antoine Oziol à destination de tous les constructeurs. Conçu comme un guide des travaux, il a permis d’assurer l’homogénéité et la cohérence architecturales. 

Art et sciences

La nouvelle Manufacture abrite aujourd’hui le pôle d’excellence de géosciences, de l’eau, de l’environnement et de l’ingénierie (G2EI) de l’Université de Strasbourg, inauguré en décembre 2023. Cet espace de 7300 m², d’une capacité d’accueil de 1270 personnes, comprend l’École nationale du génie de l’eau et de l’environnement de Strasbourg (Engees) ainsi que l’École et observatoire des sciences de la terre (Eost). 

De l’autre côté de la cour, la Haute école des arts du Rhin (Hear) déploiera une partie de ses activités sur une surface de 4320m², acquise à cette fin par la municipalité. Les artistes en devenir y feront leur première rentrée en septembre 2024. 


Cette proximité doit permettre de consolider les liens entre arts et sciences, via des projets universitaires et par la création d’un centre de ressources documentaires commun aux deux structures.


Ce pôle universitaire est complété par un autre dédié à l’innovation et à l’entreprenariat, porté par l’incubateur Semia et l’association Actions pour le développement créatif des organisations (Accro). Les deux acteurs entendent faire de la manufacture un lieu d’hébergement de startups, de formation et d’animation autour de l’entreprenariat. Ils ont pour voisins le tiers-lieu Digital Village, un espace de coworking rassemblant des professionnelles et professionnels du numérique, et le studio Lab’ut pensé comme un lieu de création sonore et musicale qui sera amené à collaborer avec l’espace évènementiel, porté par le Tiers Lab, en cours de création.

Vie de quartier

La place accordée à la jeunesse entre les murs de l’ancienne fabrique a aussi déterminé la création d’un Hostel, une auberge de jeunesse nouvelle génération. Outre les 264 places d’hébergement, The People Hostel possède un bar-restaurant ouvert à toutes et tous.Au centre de la cour, en lieu et place de l’ancienne chaufferie, la coopérative Kooma dédie 1300 m² à l’alimentation et à l’agriculture biologique. Un magasin de producteurs, une épicerie, un snacking paysan, une brasserie, un pub, une salle de réunion et un restaurant gastronomique occupent l’espace.  « C’était un challenge de s’ouvrir à tous les publics et de proposer une offre correspondant à tous les besoins », confie Patricia Jung-Singh, la présidente de la coopérative. 

« C’est un nouveau chapitre qui s’ouvre au cœur de la Manufacture des tabacs : cet écosystème dynamique, qui rassemble arts, sciences, entrepreneuriat et animations urbaines permet l’émergence d’un projet fédérateur, ouvert sur la ville et tourné vers la jeunesse », souligne Jeanne Barseghian, la maire de Strasbourg.


Ces offres s’adressent notamment aux habitantes et habitants du quartier. Car après avoir vécu en vase clos pendant des décennies, la Manufacture s’ouvre sur le quartier et les abords sont réaménagés en ce sens.  « 2000 personnes vont aller et venir tous les jours, estime Alain Jund, vice-président de l’Eurométropole en charge des mobilités. Il faut nécessairement réorganiser l’espace pour permettre les déplacements. » A l’arrière, la rue de la Manufacture devient une grande zone de rencontre piétonne et végétalisée. La rue de la Krutenau et la place du Pont-aux-Chats sont réorganisées, avec un trottoir élargi et une nouvelle piste cyclable de la rue Munch jusqu’à la rue Sainte-Catherine. Une bande végétalisée, abritant tables et chaises, séparera les espaces piétons et cyclistes et une voie sera conservée pour la circulation des bus et voitures. Sur les 7800 m² concernés par le réaménagement, 1000 m² seront dédiés aux espaces verts et 16 arbres seront plantés. Le chantier, entamé en janvier 2024, prendra fin au mois de septembre.

 

  • 16 274 000 €

    participation de la Ville

  • 12 782 000 €

    Participation de l'Eurométropole

  • 33 561 200 €

    Participation de la Sers

  • 19 450 000 €

    Participation de l'Unistra / Plan Campus

  • 82 068 000 €

    Coût total du projet 

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